« J’ai tout
essayé, madame Rossignol. Tout ! Un neuropsychologue a d’abord évalué mon
fils. Il lui a diagnostiqué un TDA(H), doublé d’un trouble anxieux. Ensuite, j’ai
fait suivre mon fils par une orthopédagogue pendant trois ans. Je l’ai même
fait voir par un psychologue, sans parler des médecines douces qu’on a essayées
pendant un moment. Même l’alimentation, madame Rossignol. J’ai tout essayé.
Mais rien n’y fait. Rien ne fonctionne sans parler de la facture. Une facture salée. Je commence à me sentir désabusée et j’ai peur de ce que l’avenir réserve
à mon fils. Pourquoi rien ne fonctionne ? Pourquoi mon fils refuse-t-il
toujours de s’appliquer à la tâche, de faire ses devoirs et de bien les faire ?
»
« Votre fils
ne fait rien parce qu’il est motivé à ne rien faire et que vous ne l’avez pas
entendu jusqu’à présent. Pis encore : vous l’avez incité à s’entraîner à ne
rien faire. Et plus vous continuerez à ne rien entendre plus astucieux sera votre
enfant sur les stratégies qu’il inventera pour ne rien faire sur ses
apprentissages. En fait, j’ajouterais ceci : votre fils ne fait rien parce
qu’il est intelligent. Il sait que, s’il s’aventurait dans le monde « fantastique
des apprentissages du français », il en sortirait amoché. Il sait que cela ne
serait pas une partie de plaisir. Il sait que ça lui ferait mal, parce qu’il se
sentirait humilié et que ça serait invivable pour lui, voire impensable, de s’adonner
à de telles tortures. En somme, votre enfant est motivé à se protéger, à
protéger son estime de lui, estime qu’il a perdue depuis qu’il a posé les yeux
sur un livre et qu’il n’y a vu que du feu.
Donc, avant
qu’il se décide de se réinvestir dans ses apprentissages, vous devrez vous
lever tôt, car, dans les faits, votre fils, tant qu’il ne sera pas convaincu qu’en s’y remettant il
puisse « performer », jamais, il ne bougera. Jamais, votre fils ne s’investira
dans ses apprentissages. En fait, il préférera descendre aux enfers plutôt que
de s’appliquer à la tâche, parce que le coupable, au fond, ce n’est pas lui. La
coupable, c’est la langue française.
C’est la
langue française, la coupable, parce que personne ne l’entend celle-là. Elle
est sournoise. Aussi, comme personne ne s’en soucie, parce que tout le monde
croit que la langue française ne fait pas partie de l’équation sur le redressement
des apprentissages du français d’un apprenant TDA(H), ce qui, en soit, est
illogique, votre fils persistera à rester dans cette voie sur ses
apprentissages. Et il continuera à s’y enfoncer parce que c’est le français qui
est responsable de son état d’être. De cela, il en est convaincu.
C’est lui qui en est la cause parce que c’est à cause de lui qu’il a jeté par-dessus bord son système d’émulation. Pis encore : par sa faute, on l’a obligé à voir plein de spécialistes, lesquels, au fil du temps, l’ont amené à croire qu’il a des bobos dans le traîneau. Par sa faute, ses parents l’ont grondé bien des fois parce qu’il a refusé de faire ses devoirs. C’est pour cela qu’il le déteste, qu’il déteste le français.
Mais c’est
surtout parce qu’il ne se sent pas entendu. Votre enfant est pourtant très
limpide dans ses propos, et ce, depuis un bon moment : je ne comprends,
maman, en classe, les explications de la prof sur la matière, vous a-t-il
argumenté, un jour, parce que vous lui brandissiez son bulletin, le visage rouge
cramoisi, état d’être qui n’a fait que le tourmenter, voire l’inciter à se
tourner le couteau dans la plaie et lui faire d’avantage détester le français.
Ce n’est pourtant pas compliqué à comprendre. Il vous l’a dit. Et à plusieurs
reprises : je ne comprends pas, maman, les notions que m’enseigne ma prof.
Donc, quand
bien même que vous paieriez des dizaines de milliers de dollars pour obtenir un
bon diagnostic, un plan d’intervention adéquat, des rencontres en privé avec une orthopédagogue, du tutorat, un, deux ou trois psychostimulants, des Klendaks, pendant
qu’on y est, tant qu’il se sentira incompris, votre fils ne bougera pas sur ses
apprentissages.
Ce que vous
essayez de faire, en somme, c’est comme vouloir tirer un pet d’un âne mort :
votre enfant ne bouge pas parce qu’il est motivé à se protéger. Parce qu’il est
motivé à protéger son estime personnelle. Parce qu’il est motivé à protéger son
estime de lui pour le peu qu’il lui en reste.
Qu’est-ce
qui le fera donc bouger ? Votre fils bougera le jour où vous lui
procurerez de l’outillage sur ses apprentissages qui lui permettra de se sentir
compétent et efficient. Et ce qui peut l’amener à l’être, c’est un élément
déclencheur, soit du matériel pédagogique adéquat, c’est-à-dire du matériel qui
l’incite à s’investir dans un processus de compréhension. Du matériel qui
répond, en fait, à ses milles et une question. Du matériel qui lui permet enfin
de comprendre la notion à l’étude. Dès lors, votre fils s’investira dans ses
apprentissages puisqu’il aura un as dans sa poche qui lui permettra de bonifier
son estime de lui. Un allié, en quelque sorte,
puisque la langue française ne sera enfin plus une menace pour lui.
Et
croyez-moi, tout enfant TDA(H), lorsqu’on lui fournit du matériel pédagogique adéquat, s’investit dans ses apprentissages, au début, avec réticence, je l’avoue
; ensuite, avec entrain ; et enfin, à fond de train, car il lui tarde de
pouvoir à nouveau se mesurer à ses pairs et parce qu’il se sent désormais armé
pour le faire. »
www.tutoratdefrancaismetacognition.com
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