mercredi 27 avril 2016

« CHER GUMBY, HIER, J’AI FAIT PLEURER UN ADOLESCENT TDA(H) ! »

                                                                 1re MOUTURE

Faute d’avoir le goût de m’adresser au Tout-Puissant puisque je me remets en question sur mes croyances religieuses ces temps-ci, j’ai décidé de faire affaire avec Gumby, que j’ai nommé l’Être-Suprême-Intérimaire-De-Dieu.

Pour les jeunes générations qui ne le connaissent pas, Gumby est un personnage animé… disons particulier, qui a fait fureur dans les années 1970.

Voici donc ce qui m'incite à m’adresser à l’Être-Suprême-Intérimaire:

« Cher Gumby, hier, j’ai fait pleurer un adolescent TDA(H) qui finit son troisième secondaire en juin prochain !

Je venais de l’évaluer sur ses compétences en français et j’avais déjà une très bonne idée sur le portrait global de sa situation sur ses apprentissages que je lui ai dépeint, bien sûr. Il fallait que je le fasse. Il fallait que je lui dise les vraies choses. Mais combien ce fut difficile pour moi de m’acquitter de cette tâche : l’adolescent accuse plus de trois années de retard sur ses apprentissages en français. Sac à papier !

En m’écoutant lui faire un compte rendu sur mes observations sur son évaluation, le petit loup est venu les yeux plein d’eau, et ça m’a brisé le cœur. Comme pour me rendre la tâche encore plus difficile qu’elle ne l’était déjà, en parlant à la maman, celle-ci m’a confirmé qu’« elle avait fait suivre son garçon par des professionnelles en éducation spécialisée pendant plusieurs années, lorsqu’il se trouvait au primaire ». De plus, elle l’a fait évaluer deux fois plutôt qu’une par une orthophoniste et un psychologue. Fudge ! Pis encore : le petit chou se trempe le pied dans son rêve depuis trois ans puisqu’il étudie dans une école de cirque.

Bien qu’on me prétende être le Département-Des-Miracles sur le redressement des apprentissages du français, il y des moments où ça devient lourd à porter, ce rôle. C’est là que j’ai le goût de tout lâcher. Mets-toi à ma place, Gumby : ce jeune garçon TDA(H) s’autodiscipline depuis plusieurs années. De plus, il étudie jusqu’à très tard le soir après l’école parce qu’il caresse le rêve de devenir un artiste professionnel.

Le hic est que, l’an prochain, ce garçon devra réussir son examen ministériel du secondaire. Et il devra aussi se taper trois cours de littérature lorsqu’il sera rendu au cégep. Puis, s’il les réussit, il devra de plus réussir l’épreuve uniforme de français. Et là, Gumby, je te le confirme, l’épreuve uniforme de français, ce n’est pas de la tarte. Je t’en passe un papier. Si tu étais à sa place, tu en perdrais des bouts de « plasticine ». Je te l’assure.

À ce sujet, imagine que tu doives disserter en 900 mots sur le sujet suivant : « Si l’on se réfère aux extraits de Molière, auteur classique, et de Balzac, auteur réaliste, on constate qu’ils prêtent la même conception de l’amour à leurs personnages, amour qu’ils décrivent de façon similaire. Critiquez la véracité de cette affirmation. […] » Mais ça, ce n’est pas le pire, Gumby. Lis les extraits des textes suivants sur Molière et sur Balzac :

« Quoi ! Tu veux qu’on se lie à demeurer au premier objet qui nous prend, qu’on renonce au monde pour lui, et qu’on ait plus d’yeux pour personne ? La belle chose de vouloir se piquer d’un faut honneur d’être fidèle, de s’ensevelir pour toujours dans une passion et d’être mort dès sa jeunesse à toutes les beautés qui nous peuvent frapper les yeux ! […] 1 »

Dom Juan, extrait de l’acte I, scène II
Auteur, Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière

« Aimante et coquette, Mme de Nucingen avait fait passer Rastignac par toutes les angoisses d’une passion véritable  en déployant pour lui les ressources de la diplomatie féminine en usage à Paris. Après s’être compromise aux yeux du public pour fixer près d’elle le cousin de Mme de Beauséant, elle hésitait à lui donner réellement les doits dont il paraissait jouir. […] 2 »
Père Goriot
Honoré de Balzac

Y as-tu compris quelque chose, Gumby ? Lorsque je te disais que tu en perdrais ta « plasticine », je n’étais pas très loin de la vérité. Et là, je ne t’ai pas encore parlé des erreurs : si tu commettais des erreurs de syntaxe, de grammaire, d’orthographe, de ponctuation et d’homonyme, dans ton texte, on en ferait le compte, puis, on le retrancherait de ton résultat final. En fait, on enlève jusqu’à 30 points du résultat final sur les erreurs laissées dans ta dissertation. Un chausson aux pommes, avec ça !

Cela dit, bien que je sois tentée de quitter le Département-Des-Miracles, je vais y rester : je vais relever le défi sur ce jeune garçon, en l’amenant à devenir très compétant sur ses notions de la langue française. Je vais le faire parce que ce garçon, honorable et courageux, va bien au-delà de ses peurs. Je vais le faire parce qu’il est l’espoir de demain et que ça, ça me rappelle pourquoi je fais ce que je fais.

À suivre !

Manon Éléonor Rossignol
isorypoutch.blogspot.com
www.tutoratdefrancaismetacognition.com
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