mardi 27 décembre 2016

JE TE PROMETS D’ÊTRE UNE GRANDE DAME, MAMAN !


1938-2016

Enfant, je me disais que tout est possible puisque c’est l’exemple que tu me donnais : tu trouvais toujours une solution à chaque problème qui survenait dans ta vie.
C’est toi qui réparais les téléviseurs quand papa était incapable d’y arriver lorsque vous aviez votre commerce d’appareils électroniques à Chûtes-aux-Outardes. J’étais très fière de toi : ma mère est la première femme au Québec à être « électronicienne ».  Ouf !
Lorsque je venais te voir à ton bureau pour que tu m’aides à faire mes devoirs de mathématique et que je te prenais à faire la comptabilité de la journée, je me disais que tu allais me donner tes mille et un trucs pour que je devienne comme toi : une experte en calcul.
À la maison, j’étais fascinée par tes « pouvoirs » que je ne manquais jamais de venter à mes amies : « Ma mère ‘’ fabrique ‘’ du pain. Elle sait aussi se servir d’un marteau, d’une scie à onglets, d’un gallon à mesurer. Pour ma mère, changer une fenêtre, c’est comme faire une tarte : c’est facile à faire. Mais ça, ce n’est rien ! Elle peint des paysages sur des toiles et fabrique des maisons de poupée. Donne-lui quelques mouchoirs, une épingle à cheveux, et elle ten fait une fleur. Oui, ma mère sait tout faire ! »  
Adolescente, je te trouvais dure : « Prépare la pâte à pizza, Manon. N’oublie pas de remplir la boîte à bois de buches1 pour que tu puisses allumer le poêle à bois demain matin. Va nourrir les animaux à cinq heures le matin. Fais la vaisselle avec ta sœur après le souper. Passe la tondeuse. Désherbe le jardin. »
Durant mes années d’étude, je t’en voulais : « Tu es capable de t’arranger sans moi, Manon. Débrouille-toi. Je ne peux t’aider financièrement. Tu trouveras une solution à tes problèmes. Trouve-toi un boulot d’été. Ramasse tes sous pour tes études. »
C’est beaucoup plus tard que j’ai compris ce que tu as fait : tu m’as obligée à devenir une femme responsable. Une femme responsable de ses choix. Tu m’as incitée à croire en moi, à croire en mes talents. Tu m’as montré à voir la vie dans tous ses aspects, notamment lorsqu’elle se sert de ses gros souliers pointus : elle fesse, et il faut alors savoir s’y préparer pour pouvoir en sortir grandi. Aujourd’hui, j’ai compris combien c’est précieux d’avoir une mère.    
Demain, l’on se verra une dernière fois. Demain, l’on se fera une dernière embrassade, et je te laisserai ensuite partir pour ton éternelle demeure.
Je te promets d’être une grande dame, ici-bas, maman. Je te promets de continuer à être une femme bienveillante. Je te promets de te faire honneur et de mettre, à bon escient, tous les talents que tu m’as transmis.
Je t’ai toujours aimé, maman. Et je continuerai à t’aimer éternellement. Merci de m’avoir donné la vie ! 
1. Nouvelle orthographe

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